vendredi 16 octobre 2015

L'amour avec deux amants ? D'accord, mais pas avec toi !

Les fantasmes ne sont délicieux que s'ils franchissent la frontière du charnel un jour en ayant pour but le plaisir, et s'ils ne laissent pas de blessures.

Je me suis toujours opposé au concept des fantasmes qui devraient rester dans le domaine du rêve, dans la boite à fantasme qu'on enfouit au fond de soi, dans le monde imaginaire qu'on s'invente pour colorer arc en ciel un quotidien moins exaltant, pour idéaliser ce que le charnel pourrait être, sans jamais vraiment l'effleurer. Y compris pour moi-même.

C'est souvent avec des femmes que cette frontière a fait l'objet de longues et interminables discussions. Je comprends que le fantasme de Georges Clooney ou de la brigade de pompiers doivent rester du domaine du fantasme, parce que vraiment inatteignables. Mais, dans ce que les femmes en général, et mes correspondantes en particulier ont eu loisir de débattre avec moi, et d’échafauder comme joute épistolaire ... il y a tellement de possibles qui peuvent être mis en musique comme une symphonie des sens, qu'il serait trop dommage de s'asseoir dessus à cause d'une croyance limitante ou d'un verrou empêchant de franchir le pas, la porte du réel. Regardez donc les mille sites web qui font maintenant leur marronnier des Top 10 des fantasmes féminins.

Une fois qu'on a fait le tour de la question, c'est à dire le pour et le contre, et comprendre que le fantasme se réalisant doit être aussi une recherche du plaisir, apparait aussi la question de l'interdit. Braver l'interdit que l'on avait, chacun ayant ses limites, peut faire tomber tout glamour à une situation. J'ai personnellement touché des murs dont je n'aurais pas dû m'approcher, et d'autres fossés que je croyais infranchissables se sont révélés petits ruisseaux qui s'enjambent pour courir dans de nouvelles prairies du plaisir.

Néanmoins, j'ai eu vite à me résoudre à un constat. Assouvir un fantasme, au féminin, c'est surtout une histoire de "avec qui". Car le fantasme est aussi une histoire de l'image de soit. J'en suis capable ou je n'y arriverai pas....voire souvent, vais-je être rejetée.

Par exemple, fantasme masculin très classique, mais aussi au féminin, la sodomie peut vite toucher l'image de soi, largement autant que l'inconfort de la situation si abordé maladroitement. Une femme qui se refuse à un amant qui lui courtise les fesses peut se retrouver empêtrée dans l'image d'une femme coincée, ou peu à l'aise avec son corps, voire incapable d'avoir une sexualité assumée / ouverte.
Si la sodomie  s'est banalisée, notamment pour les jeunes générations, prenez un autre fantasme pour souligner cet exemple, comme par exemple le fantasme du viol, celui de la pluralité, celui de la bisexualité, celui de l’exhibitionnisme.

Il est plus aisé d'aborder avec son amant ou son amante, des fantasmes qui vous installent dans un univers et un rôle qui est un peu décalé avec  l'image que vous projetez dans vos autres bulles intimes, les ami(e)s, la famille, le boulot ... et le/la conjoint(e).

J'ai moi même une demi tonne de fantasmes que je n'ai jamais mis en musique sous mon toit. Il est des sujets qui ne peuvent se mettre en oeuvre sans laisser de traces.

Mais ce jour là, je partageais sur nos fantasmes respectifs de manière assez directe et sans détour avec une amante devenue très très intime, et je suis tombé de haut. Nous qui avions construit un univers très charnel et sans autre vraie limite que nos emplois du temps, je me suis vu retourner un non catégorique à l'idée de lui offrir un trio avec deux hommes : "L'amour avec deux amants ? D'accord, mais pas avec toi ! "

Nous étions, à un second niveau, entrés dans cette entremêlement du sensuel et de l'attachement qui ne sublime plus du tout le coté charnel comme une nécessité ou un moteur, mais comme un moment de fusion amoureuse des corps ... et par la même, certains fantasmes ne pouvaient plus prendre forme sans laisser de traces, ou devaient se réaliser dans un secret qui ni ne blessent pas, ni n’entachent l'image de soi dans les yeux de l'autre. Mon amante, quel que soit le niveau d'accord et de convergence charnelle, n'imaginait plus la fusion des sens comme une exaltation qui disjoncte le cerveau et étanche une soif de l'autre, mais comme une réunion des deux parties, des deux moitiés d'un tout, cette fameuse recherche de l’âme sœur que l'on retrouve dans le mythe de l'androgynie du banquet de Platon.

Alors oui, quand cet état d'extase ne passe plus que par une et une seule personne, dans un amour fusionnel des sens et de l'esprit, alors, les fantasmes, notamment ceux qui introduisent un biais, voire un corps étranger, ne sont plus les bienvenus. Ce qui était très étonnant, c'est que nous avions construit cette bulle, bulle éphémère soit, dans un élan de couple illégitime qui avait commencé de manière fantasmatique et charnelle.

Un fantasme, ne vaut que s'il a pour but le plaisir (direct ou indirect). J'y ai ajouté à partir de ce jour là qu'un fantasme passe du théorique au concret si on a trouvé avec qui le cristalliser. Soit pour le sublimer, soit au contraire pour pouvoir s'en détacher.

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